mercredi 10 décembre 2014

Souvenance


J'ai vu, sur un écran fidèle, ces regards incolores, liquéfiés et abstraits. Des regards émaciés dans leurs profondes orbites. Voyageurs égarés aux corps nus et osseux qui marchent lentement vers un cruel destin.
Aucun visage connu dans cette foule immense, mais la peur que j'ai lue dans les yeux résignés m'arrive en pleine gueule comme un honteux regret. Il y a là ma chair, mes parents mes ancêtres, leurs amis et leurs frères ; esclaves d'un monde fou ils vont, menés par des tribuns au cerveau trafiqué, vers l'incinérateur.
Aucun ne m'est connu, aucun ne m'a connu, pourtant leurs pleurs et leurs cris m'appellent et me supplient.
Que jamais ces mémoires assassines ne s'évaporent dans l'oubli !
Que les bourreaux n'oublient pas leurs esclaves !
Que les esclaves se souviennent de leurs bourreaux !


Dd



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